Si vous êtes allé faire un tour cette année sur le site du tournoi de Roland Garros, vous avez sans doute remarqué qu’il avait été relooké d’une part et que d’autre part vous avez accès à tout un tas d’informations nouvelles issues des technologies les plus pointues. Quelles sont-elles ? Comment en tirer profit devant les matchs ? Et surtout comment ces applications servent les entraîneurs de haut niveau. On fait le point en compagnie du partenaire informatique historique (depuis 1985) et inventeur du radar à service.
Cela fait des années que la firme IBM, qui fête cette année ses 30 ans de partenariat avec la Fédération Française de Tennis sur le tournoi de Roland Garros, nous propose les scores de tous les courts en direct. La société américaine traite aussi la faramineuse masse de statistiques collectée chaque année par les marqueurs des scores. IBM relaie aussi sur le site de Roland Garros certaines statistiques fournies par les raquettes connectées Babolat (Rafa Nadal et Caroline Wozniaki pour les plus connus).
Les nouveaux outils de 2015
Mais aller jusqu’à presque donner le résultat d’un match avant qu’il ne soit joué, c’est la conséquence de l’apparition de ces nouveaux outils assez impressionnant. Et c’est loin d’être terminé avec l’apparition très prochaine des textiles et chaussures connectées. Il va falloir d’ailleurs penser à fixer des limites à la fourniture de toutes ces données dont certaines pourraient bien empiéter sur l’intimité des compétiteurs.
Je pense à l’application « Watson Personality Insight » qui analyse la personnalité des joueurs en fonction des tweets qu’il envoie (IBM est partenaire de Twitter).
Le système cognitif Watson (qui analyse le langage humain et a battu des vrais joueurs dans la version américaine de Jeopardy) va encore plus loin en structurant les données et en étant capable d’évaluer différentes hypothèses
« Choose the best match » vous propose de sélectionner le meilleur match du jour en fonction de vos propres critère : le match le plus offensif ou le match le plus défensif par exemple. Dommage qu’il n’y ait pas encore mon critère préféré qui s’appellerait opposition de style. Il proposerait le match des extrêmes entre le joueur (ou la joueuse) le plus offensif et le joueur le plus défensif.
Watson analytics est capable d’analyser 10 ans de données collectés sur les tournois du grand chelem et d’extraire des réponses visuelles (courbes, cartes).
Watson Analytics est un moteur de recherche d’information sur le tennis intelligent.
Watson Engagement Advisor, sélectionne les meilleures réponses aux questions de tennis qu’on lui pose.
Les clés du match
Mon outil d’analyse prédictive préféré, le plus ludique, se sont les clés du match. Au départ de chaque match, chacun des deux adversaires doit réunir trois conditions pour l’emporter, les fameuses trois clés. Ces trois conditions sont issues d’une cinquantaine de stats (du style pourcentage de points gagnés sur la première balle de service) collectées par le joueur ou la joueuse sur les quatre tournois du grand chelem. Sur un set du match, si le joueur A rempli ses trois conditions et que le joueur B n’en rempli aucune, le joueur A a 95% de chance de gagner le set.
Sur le quart de finale Djokovic/Nadal, les clefs étaient pour Djokovic de remporter plus de 70% de point derrière son premier service, de remporter plus de 52% de point sur un coup gagnant ou une faute provoquée et de remporter plus de 80 % de points côté coup droit (forehand a été traduit par erreur revers). Les clés de Nadal étaient de remporter plus de 49% de point sur un coup gagnant ou une faute provoquée, de servir moins de 22% de service sur le T et de remporter plus de 32% de points sur le service adverse.
Le regard de Sebastien Grosjean entraîneur de Richard Gasquet sur l’utilité et les limites des statistiques.
Un entraineur de haut niveau est très attentif aux statistiques fournies par l’informatique pour plusieurs raisons.
La première c’est que l’informatique permet de chiffrer la progression d’un joueur par la collecte de données difficilement accessibles à la main : Vitesse moyenne des coups, distance parcourue.
La deuxième c’est qu’elles permettent d’analyser comment les adversaires jouent les points important et par exemple dans quelles zones ils servent sur les balles de break.
Et une troisième raison, c’est que les statistiques montrent dans quels secteurs du jeu les champions remportent leur matchs et sur quels secteurs de leur jeu ils doivent se concentrer pour augmenter leurs chances de l’emporter. Roger Federer par exemple se sera sur la qualité de sa deuxième balle de service (% de points gagné sur deuxième balle). D’ailleurs Roger ne joue que des deuxièmes balles lors de ses matchs d’entraînement.
Richard Gasquet par exemple avait un déficit de musculature sur le haut du corps, ce qui est certainement à l’origine des problèmes de dos qui l’ont handicapé ces derniers mois. Le travail de musculature fourni récemment a porté ces fruits puisqu’il a été démontré que la vitesse du service de Richard ne baissait plus au fil des sets mais se maintenait beaucoup mieux.
Toutes cela me fait penser à une réflexion d’Ivan Lendl, alors coach d’Andy Murray, qui répondait à une journaliste qui lui demandait pourquoi il passait autant de temps à éplucher les statistiques de son poulain. Ivan avait alors répondu de manière laconique
« Certains entraineurs ne s’intéressent pas aux statistiques, c’est leur choix ».
le site officiel de Roland Garros
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